Neurosciences, quoi de neuf pour la petite enfance ?

mercredi 20 juin 2018, par Martine Couttelin

Le Furet - Dossier Neurosciences, quoi de neuf pour la petite enfance - n°87 de décembre 2017

Nature : des histoires qui s’entrecroisent
Un projet « éducation familiale et nature » en Toscane : recourir aux souvenirs d’enfance des parents...

A travers les yeux d’un enfant
Deux projets européens, des ateliers dans des structures de la petite enfance, des photos prises par les jeunes enfants pour ouvrir nos yeux sur leur monde...

Neurosciences et épigénétique. L’enfant en développement : une belle équation entre la génétique et l’environnement, de Pascale Toscani.
Personne ne peut présager du développement d’un enfant, il est donc très important de ne jamais douter de ses capacités et de l’aider à comprendre que toutes les actions qu’il entreprendra à grandir, à évoluer. Valoriser un enfant, l’aider à expérimenter, croire en lui, participera à favoriser cette plasticité cérébrale.
Un autre facteur participer à la remise en cause du déterminisme humain. Il s’agit de l’épigénétique.
Pour se développer, un enfant doit évoluer dans un environnement suffisamment sécure pour tenter les expériences que la vie lui offrira. Tout petit déjà, il cherchera dans le regard de l’adulte cette reconnaissance dont il est dépendant pour exister. Le regard positif que l’on porte sur un enfant est le moteur inconscient de la communication et l’un des processus fondamentaux à travers lesquels se construisent l’identité personnelle et le fonctionnement cognitif.
« Au cours du développement, l’environnement prend peu à peu le pas sur le programme génétique ». Yehezekel Ben Ari, de l’Institut de neurobiologie de la Méditerranée de l’INSERM.
« Nous sommes liés au déterminisme génétique, parce que nous sommes déterminés pour évoluer. Le plus enrichissant pour le cerveau n’est pas tant l’héritage de l’espèce, mais ce qu’il va pouvoir faire, apprendre et transmettre ». Pierre-Marie Lledo.

Neurosciences, relation sociale et émotion. Que nous apprennent les neurosciences affectives et sociales (NAS), de Catherine Guegen
Le cerveau de l’enfant est plus immature, malléable et vulnérable que tout ce qu’on imaginait jusqu’à maintenant.
Les recherches nous éclairent sur les conditions nécessaires à l’épanouissement de l’être humain et nous disent qu’il est essentiel d’avoir une relation de qualité avec les enfants et les adolescents, c’est-à-dire une relation chaleureuse, empathique, soutenante et de les aider à « travailler » leurs émotions pour que leur cerveau se développe de façon optimale. Les expériences relationnelles transforment en profondeur le cerveau de l’enfant en modifiant la sécrétion des molécules cérébrales, l’expression de certains gènes, les télomènes des chromosones et les systèmes régissant le stress.

« L’enfant petit en dessous 5-6 ans ne peut pas réguler ses émotions, ses impulsions car son cerveau est immature ». En-dessous de 6 ans, le cerveau archaïque et émotionnel domine et l’enfant se contrôle difficilement. Plus l’enfant recevra de l’empathie plus il deviendra lui-même empathique et plus il sera sociable.
« Quand l’adulte est empathique, bienveillant, soutenant, le cerveau se développe de façon optimale mais l’inverse est vrai ». Plus l’enfant recevra de l’empathie plus il deviendra lui-même empathique et plus il sera sociable.
Chaque fois que l’adulte aide l’enfant à mettre des mots sur ses émotions, il aide le cerveau à maturer. « Câliner, prendre soin, sécuriser, rassurer, consoler n’est pas réservé aux femmes, ni au bébé, les hommes sont capables de materner et, à tout âge, on peut avoir besoin d’être materné ». Le maternage fait secréter l’ocytocine, qui favorise l’empathie, l’amour, l’amitié, la coopération et diminue l’anxiété. Enfin, il active le parasympathique, qui régule les émotions, apaise, améliore la faculté de penser et de se concentrer.
Les humiliations verbales, le stress freinent la maturation du cerveau et l’apprentissage et donnent des troubles du comportement. Le stress diminue les capacités d’apprentissage.
De nombreuses recherches ont montré l’impact du stress sur l’hippocampe, dédié à l’apprentissage et à la mémoire. Le stress, la comparaison aux autres, les notes sont contre performant et altèrent l’apprentissage.

Un nourrisson en développement dans un environnement particulier, Bernard Golse, Neurosciences et psychanalyse
L’inachèvement premier de l’être humain (contrairement aux animaux tels que le poulain, le veau), a pour nom la néoténie. Cette inachèvement est source de diversité.

Corps et cognition : une union évidente à réaliser !, Marjorie Burger-Chassignet, Neurosciences et apprentissage tout au long de la vie
Le mode somatique qui caractérise la période pré-linguistique (de la naissance à 2 ans) est le premier des 5 types de consciences décrits par Egan. Les autres modes de compréhension du monde sont les modes : mythologique, romantique, philosophique et ironique. Il existe une dynamique d’adaptation et de réajustement perpétuels, à l’oeuvre dans le jeu libre notamment qui permet, à la fois, d’affiner le jeu et de s’affirmer soi-même dans l’action.

Le bébé : qui est-il ? d’où vient-il ? où va-t-il ? de Josette Serres et Christine Schuhl
Les nouveau-nés détiennent des connaissances essentielles qui témoignent de nos origines.
Loin de naître avec un cerveau vierge, l’enfant vient au monde équipé d’un patrimoine impressionnant de savoirs, de capacités et de compétences. Le cerveau du nouveau-né possède déjà cent milliards de neurones et ce nombre n’augmentera plus beaucoup. Mais moins de la moitié de ces neurones sont connectés entre eux.
La mise en place des synapses ne se fait pas de façon homogène. Le rythme de maturation diffère selon les régions cérébrales. Les aires sensorielles, comme le cortex visuel par exemple, arrivent à maturité les premières. Le cortex préfrontral (indispensable pour planifier les actions, contrôler et inhiber certains choix) et les noyaux gris centraux mettent plus de 15 ans à arriver à maturité et peuvent d’ailleurs se modifier toute la vie durant. On remarquera qu’avec un grand choix de combinaisons synaptiques, chaque expérience humaine étant unique, le câblage du cerveau sera propre à chaque individu.

Trois aspects fondamentaux :
1) Les neurones miroirs3 impliqués dans les apprentissages cognitifs tels que l’imitation précoce (nouveau-né qui imite un adulte lui souriant ou riant la langue) et le développement émotionnel, notamment l’empathie ;
2) Les travaux dits de « l’événement impossible » de R. Baillargeon. Elle a démontré que, dès 4-5 mois, le bébé a compris que l’objet continue d’exister lorsqu’il disparaît de sa vue (permanence de l’objet) bien plus tôt que ne l’affirmait Piaget ;
3) Les travaux de O. Houde pour qui « se développer c’est non seulement construire et activer des stratégies cognitives, comme le pensait Piaget, mais c’est aussi apprendre à inhiber des stratégies qui entrent en compétition dans le cerveau. »

Et si nous évitions de nous prendre les pieds dans les pieds dans les étiquettes, de Christian Philibert, formateur-conseil
En Finlande :
« Nous ne voulons pas d’une école maternelle telle que vous la concevez en France, parce qu’elle présente pour nous deux inconvénients majeurs :
- Les enseignants ont un programme et les enfants sont évalués. Ce qui compte (pour nous en Finlande) est le développement des capacités cognitives, relationnelles et physiques de l’enfant selon son rythme.
- La pratique de l’évaluation est mortifère et les choses ne vont pas en s’améliorant. Les évaluations des plus jeunes enfants induisent que nous devons toujours nous situer par rapport à une norme et par rapport aux autres. Ainsi avons-nous créé une culture de l’étiquette, de la catégorisation. Albert Jacquard rappelait notamment que « nous sommes ce que le regard des autres fait de nous ».
Nous assistons à une nouvelle forme de pression : la pression de la performance, « réussir son enfant » !
Déterminer très tôt des « profils d’apprentissage », c’est priver l’enfant d’explorer toutes les possibilités qui lui sont offertes et qu’il doit découvrir en étant accompagné par des adultes ou en partageant avec ses pairs.
Bibliographie : Une éducation bienveillante stimule le développement cérébral.

1, 2, 3... Pirouette, galipette et saut de chat, de Anne-Laure Rouxel, chorégraphe et danseuse
Nos neurones ont besoin d’interactions sociales et environnementales riches et variées.
« Offrons à tes milliards de neurones (ceux du petit homme) de la matière à penser et à rêver. Mais, attention tes connexions s’activeront, si et seulement si nous avons du plaisir à transmettre ».
Certaines activités, comme la danse, stimulent tous les mécanismes fondamentaux essentiels au développement de l’enfant : le système cérébral empathique et affectif, les habiletés sensorimotrices, l’attention soutenue, la mémoire, la créativité et l’imaginaire, le système cognitif et le langage.

 Ca nage pas, les plantes ! », de Summer Salz et Céline Samin
« Une meilleure coordination motrice (équilibre, coordination et agilité) et une façon plus créative de jouer, ce qui favorise le développement du langage et le raisonnement abstrait.

Les vendredis su plurilinguisme » « langues en cadeaux », de Marie Nicole Rubio
On est surpris de constater à quel point la fiction du monolinguisme filtre notre perception de la réalité.
La langue maternelle : un soutien pour l’acquisition précoce d’une langue autre. Comment préparer une rentrée plurilingue : outils, méthodologie, idées créatives pour inclure les langues des familles dans votre projet pédagogique.
Participation des parents à différentes actions :
- Affichage des mots de bienvenue en plusieurs langues
- Réalisation du train des mots « transparents » qui se ressemblent, écrits dans différents alphabets, puis transcrits pour que tout le monde puisse les prononcer
- L’élaboration d’un glossaire des « petits mots qui rassurent » pour consoler, réconforter, accompagner
- Toutes les situations qui engagent la parole telles que le repas avec la désignation des aliments, la reconnaissance des couleurs...
Reconnaître les enfants plurilingues dans ce qu’ils sont ; assurer leur bien-être, le sentiment de sécurité, l’estime de soi et l’image positive qu’ils vont construire d’eux-mêmes et des autres.

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